Voici un article paru en juin 2005 dans Rédactuel, magazine de l’Association Royale Belge de la presse d’entreprise, devenue ABCI (Association Belge de la Communication Interne).
Miriana Frattarola. Ne vous fiez pas à son nom qui fait penser au nom de scène d’une artiste de cirque italienne. Miriana n’a rien d’une clown. C’est au contraire une grande professionnelle de la presse écrite (notamment 17 ans au magazine Flair, dont cinq en tant que rédactrice en chef). Elle fut ensuite (notamment) Communication Manager de Sanoma Magazines qui édite une quinzaine de magazines grand public… dont Flair. La justesse, l’audace et la modestie de Miriana furent trois qualités très appréciées par les participants à cet atelier. Miriana a depuis quitté le domaine de la communication et des RH pour, notamment, créer des carrelages, traduire des recettes de cuisine et réenchanter le G1000.
“Vous avez toujours voulu savoir qui vous lisait ? Bon réflexe. Alors, arrêtez d’écrire, quittez votre clavier et transportez-vous dans la peau de vos lecteurs. Science-fiction ? Non, simplement une technique issue de la presse payante, à imiter dans nos médias internes. Car, comme le dit Miriana, nous devons être lus, même si nous sommes gratuits ! Compte-rendu de la présentation de celle qui se surnomme “concierge d’entreprise”. Quelqu’un qui connaît sa boîte et ses lectrices par cœur…
J’arrive le premier pour un atelier dont mon responsable a vanté la qualité. Très vite, le pourcentage de testostérone chute de manière drastique. Oh, les filles, c’est une réunion Tupperware ou quoi ? Mais non, je ne suis pas le seul homme à assister à la présentation de l’ex-femme forte de Flair, LE magazine des nanas entre 18 et 35 ans. Miriana Frattarola nous met tout de suite à l’aise : Flair est pris ici comme (très) bon exemple d’un magazine qui a eu le culot et le courage de se poser la question essentielle : “qui sont nos lectrices ?”
Flair… devait retrouver le sien
Il nous faut remonter à quelques années. Flair, en tête des ventes pendant de nombreuses années, a vu son lectorat s’effondrer. Il fallait réagir. Rapidement, un groupe de travail se met à l’ouvrage. Et de constater : avant, la presse féminine était un miroir rassurant pour la femme ; mais le rôle de la presse et la société ont évolué. Flair, du haut de ses bénéfices, se reposait sur ses lauriers. Il lui fallait au plus vite (re)trouver sa lectrice préférée.
Le groupe a alors analysé la concurrence (très large : internet, presse gratuite, etc.). Il a ensuite tenté de déterminer ses valeurs. Après un savant exercice, les valeurs du magazine ont été établies.
Puis, il a fallu trouver des applications pratiques et savoir surtout qui allait en bénéficier ! Tel Proust, nos enquêtrices sont parties à la recherche de la lectrice-type perdue…
Et puis vint Vanessa, la lectrice
Les lectrices semblaient ne plus vouloir se voir dans Flair. Fini le miroir-réalité et triste, vive le miroir magique ! Et puis vint Vanessa, invitée-surprise de cet atelier.
Sa carte d’identité, sa psychographie (à quelle tribu appartient-elle, quelles sont ses attitudes, quels sont ses goûts, ses peurs et ses motivations) ont été scrutées au microscope.
Miriana et son équipe ont alors façonné leur lectrice-modèle, ou idéale. Virginie est née. Une Vanessa améliorée (*), en quelque sorte : un meilleur job, une plus grande assurance, un style plus glamour. La relation entre ces deux nanas de papier correspondait à la relation entre la lectrice et Flair. Vous l’aurez compris : Virginie était la lectrice rêvée, celle qui définit l’identité du magazine.
Vanessa et Virginie sont ce que l’on appelle des ‘persona’, archétypes d’utilisateurs représentant un groupe plus large (Aarron Walter : Design émotionnel, page 37).
La messe était dite, il ne restait plus qu’à coucher ces conclusions dans un magazine plus tendance, en n’hésitant pas à sacrifier certaines rubriques.
Cet important travail de réflexion a été traduit dans un cahier de style (ou brandbook), bible utile tant au journaliste qu’au graphiste ou au rédacteur en chef.
Qui est votre lectorat ?
Ce témoignage peut très parfaitement se fondre dans notre communication interne. Connaissez-vous votre lecteur, cet employé de 40 ans ? Percevez-vous ses craintes et ses attentes ? Si madame la direction fait la sourde oreille, il y a du souci à se faire dans nos rédactions ! Pensez-y, pensez à votre lectorat !”
Juste !